À LA LIGNE

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Joseph PONTHUS

Editions La table ronde – 2019
CONTEMPORAIN

Quatrième de couverture :

À la ligne est le premier roman de Joseph Ponthus. C’est l’histoire d’un ouvrier intérimaire qui embauche dans les conserveries de poissons et les abattoirs bretons. Jour après jour, il inventorie avec une infinie précision les gestes du travail à la ligne, le bruit, la fatigue, les rêves confisqués dans la répétition de rituels épuisants, la souffrance du corps. Ce qui le sauve, c’est qu’il a eu une autre vie. Il connaît les auteurs latins, il a vibré avec Dumas, il sait les poèmes d’Apollinaire et les chansons de Trenet. C’est sa victoire provisoire contre tout ce qui fait mal, tout ce qui aliène. Et, en allant à la ligne, on trouvera dans les blancs du texte la femme aimée, le bonheur dominical, le chien Pok Pok, l’odeur de la mer.
Par la magie d’une écriture tour à tour distanciée, coléreuse, drôle, fraternelle, la vie ouvrière devient une odyssée où Ulysse combat des carcasses de bœufs et des tonnes de bulots comme autant de cyclopes.


Comment raconter ce que l’on ne narre jamais. Comment mettre ou trouver les mots pour un endroit coi. Pas une absence de propos par honte ou mépris, mais parce que cela peut porter préjudice de dire ce qu’il se cache derrière les murs. Lire entre les lignes de ce qu’il se passe à la ligne.

Un texte étonnant à la mise en forme particulière. À l’image du propos, il faut aller vite, ne pas réfléchir à la ponctuation ou la mise en forme, on tape les mots et on revient à la ligne pour enchaîner sur le suivant.

Le récit authentique de ce qu’il se passe dans nos usines où le rendement est le plus important, la main d’oeuvre de moins en moins considérée et payée, où les troubles musculo squelettiques existent mais mis en sourdine, non officialisés de peur de perdre sa place. L’angoisse perpétuelle de ne jamais savoir d’une semaine sur l’autre si l’on aura du travail ou non, être sans cesse sur le qui-vive en attente d’un coup de fil (souvent deux ou trois heures avant d’embaucher). Aucun répit, aucun moment de pause pour ces gens. Ils pensent usines, vivent usines, rêvent usines.

L’offre et de la demande, encore. Pour faire du profit, les entreprises doivent économiser le plus possible sur la charge ouvrière. Plus il y a de chômeurs, plus l’affluence de demandeur fait baisser le prix des contrats et augmente la quantité de travail demandé. Après tout, « estime-toi déjà heureux d’avoir un travail qui mérite salaire. Car si tu te plains, dix attendent ton trépas pour prendre la place !« . Quiconque peut aller là-bas, de l’ouvrier sans Bac à celui couvert de diplômes. Ce qui les réunis ensemble est cette simple nécessité de manger, payer ses factures. Vivre !

Un roman qui mérite tous ses prix, qui prône le respect de tout labeur, mais surtout l’amour. Ce petit rayon de soleil qui fait que l’on peut tout endurer au profit d’un moment de bonheur. J’ai été profondément émue, de la pudeur de l’auteur et de sa résignation au fil des pages. Un début colérique pour une fin angoissée à l’idée de ne jamais sortir de l’intérim. Un récit qui na pas de ponctuation, de point final, comme l’industrie qui continuera à employer à la ligne

★★★★

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